Azalée's life CHAPTER I. [ griffe de renard ]

Le Soleil était haut dans le Ciel ce jour-là. Les oiseaux volaient déjà bien haut, ils criaient leur envie de dominer le monde, ils hurlaient leur bonheur de pouvoir narguer les autres. Ils ont de la chance, les oiseaux. Ils ont sans doute la meilleure vie, les oiseaux. En effet, ils ouvrent les yeux sur un monde qui leur appartient depuis sa création. Ils déploient leurs ailes dans un ciel qui leur offre le gîte depuis des millénaires. Ils mangent des graines et des insectes, pour la plupart, qui ne cesseront jamais d'exister. Leur vie ne se rythmait qu'à cela, en réalité. Ils volaient, ils observaient, et ils dégustaient la vie avec une jouissance que peu d'animaux peuvent se vanter de posséder. Ils auront toujours ce sentiment de liberté en eux, une liberté qui ne sera jamais vraiment entachée, puisqu'elle ne survit que dans leur cerveau. Ils sont eux, tout simplement.

Les yeux verts de la jeune meneuse se posèrent délicatement sur un couple de corbeaux qui s'envolait, en croassant. Elle détestait les corbeaux. Pour elle, ils représentaient trop de mauvaises choses. Dans un premier temps, ils représentaient souvent la Mort : puisque dès que l'on distinguait un essaim de corbeaux, souvent en le suivant, nous pouvons remarquer qu'une carcasse est présente sur le sol. Ou ne dit-on pas qu'un corbeau peut suivre sur de longues distances un animal blessé ? Attendant qu'il meurt ? En second temps, les corbeaux étaient souvent associés à la mauvaise augure. Souvent, quand on distinguait leur plumage, les mauvaises nouvelles s'ensuivaient. Elle se souvenait parfaitement de ce corbeau qui s'était envolé lors de la patrouille de sa mère. Elle se souvenait aussi de ce même corbeau qui était venu se poser sur une branche à quelques minutes du retour de la patrouille. Elle aurait dû s'en douter. Elle aurait dut le comprendre. Il avait vu la Mort venir .. Il savait que sa mère était morte.

La chatte s'assit sur le promontoire présent devant sa tanière. Délicatement, elle se mit à faire sa toilette, en gardant les oreilles mouvantes. Son camp se mettait en branle. Les guerriers partaient tranquillement en patrouille, les apprentis apprenaient calmement avec leurs mentors, les Reines s'occupaient des chatons avec attention, tandis que Luciole avait encore disparu. Elle n'était jamais là. Elle ne comprenait absolument pas. Comment cela se faisait-il que la Guérisseuse disparaisse à ce point-là ? Comment cela se faisait-il qu'elle ne soit pas là quand elle n'avait pas besoin ? L'évitait-elle ? Et enfin, elle distingua que Souffle n'était pas là non plus. Il était sans doute parti en chasse .. Comme à son habitude ? Et Baie .. Non personne. Il n'y avait donc personne. La Meneuse poussa un profond soupir, termina sa toilette et se redressa. Tant pis, elle irait faire un tour : ça lui permettrait de penser à autre chose.

Cela fait maintenant plusieurs minutes que Azalée s'était mis en tête de marcher, de quitter son camp et d'explorer un peu les alentours : malgré qu'elle les connaisse par coeur. Elle avait besoin de se faire du bien, d'évacuer ses pensées négatives, d'oublier les cauchemars présents toutes les nuits. Un rouge-gorge s'envola. Ca faisait du bien de voir un autre oiseau qu'un corbeau. Peut-être que sa journée serait plus calme, pleine de bonheur ? Elle n'y croyait pas vraiment, mais elle en avait l'espoir. Son regard se posa ensuite sur un sentier : elle le connaissait aussi. Un sentier qui la mènerait à une superbe source d'eau. Alors, elle le prit sans hésiter une seule seconde. Avec une envie d'hydratation, elle s'approcha du lac et but calmement. Soudain, un mouvement derrière elle la fit se retourner brutalement et feuler.

" Qui que vous soyez, montrez-vous ! " dit-elle, menaçante.

En réalité, la jeune meneuse ne venait que très rarement sur les bords de ce lac. Bien sûr, elle était parfaitement au courant qu'il existait, que des animaux venaient y boire, que des proies venaient s'y baigner. Mais elle avait préféré l'éviter, elle avait préféré ne pas y aller. Dans un premier temps, car ça paraissait logique. En effet, elle était tout de même un chat. Et ne dit-on pas que les chats ne supportent pas l'eau ? Qu'ils ne savaient pas spécialement nager ? Qu'ils ne supportaient pas de sentir leur pelage coller à leur peau ? Si, et c'est bien pour cela qu'elle refusait catégoriquement d'y venir. Dans un second temps, car elle avait atrocement peur. Elle était totalement terrifiée par cela. Elle avait peur de tomber dans l'eau, de ne pas savoir bouger correctement les pattes et de se noyer. Que dirait son clan si il retrouvait sa meneuse noyée ? C'était un comble, n'est-ce pas ? C'est pour cela qu'elle ne comprenait pas spécialement pourquoi elle était venue ici. Mais surtout d'elle-même.

Mais d'un autre côté, elle se sentait apaisée dans un tel endroit. Les oiseaux ne criaient pas comme des abrutis, ils ne lui vrillaient pas les oreilles. Les animaux se faisaient rares, et donc les bousculades n'étaient pas présentes. Et enfin, les papillonnages des chatons n'existaient pas, les rumeurs colportées par les Reines étaient en sourdine, les disputes entre guerriers n'étaient que des murmures. Oh oui, ça lui faisait vraiment du bien. En réalité, elle se sentait seule, isolée mais elle avait besoin de cela. Elle avait besoin d'un petit endroit à elle, un endroit où elle pourrait penser qu'à son propre bien être pour la première fois de sa vie. Alors, même sa phobie de l'eau ne freinerait pas cela. Même sa peur de la noyade ne désagrégera pas son bien-être. Elle reviendrait ici, une chose est sûr. Un jour elle emmènera Luciole ou Baie, peut-être apprécieraient-elles cet endroit.

Malheureusement, son moment de répit ne fut que de courte durée puisqu'elle entendit un bruit derrière elle. Etant une chatte assez méfiante envers ce qui pouvait l'entourer, ainsi que les animaux vivant près d'elle, elle s'était retournée presque immédiatement et avait parlé. En tant que meneuse, elle n'avait pas peur du danger venant vers elle. Elle n'en avait pas le droit. Mais lorsqu'elle distingua le pelage de Griffe de Renard et reconnu sa voix, elle eut un sourire moqueur. Elle connaissait parfaitement ce guerrier, ainsi que son tempérament. Mais elle ne s'en plaignait pas : mieux encore, elle appréciait légèrement. Les chats tels que lui étaient des chats dignes de confiance, elle en était certaine. Finalement, elle s'assit, rassurée et fixa son regard sur celui du mâle.

" Bonjour Griffe de Renard. " Puis elle hocha la tête. " C'est une bonne question. Et toi ? Tu n'as pas des apprentis à instruire ? "